Je venais à peine d'arriver, oui. J'avais un inventaire à faire, oui. Était-ce professionnel de ma part de faire ce que j'allais faire ? Non. Mais j'avais tellement envie de marquer le coup ! De faire savoir aux élèves, aux professeurs que j'étais là et qu'ils avaient donc enfin quelqu'un qui s'occuperait de ce lieu si précieux qu'était la bibliothèque. C'était plus fort que moi, j'étais réellement heureux d'avoir trouvé une place on ne peut plus passionnante. Oh, je savais que les directeurs de cet établissement avaient mauvaise presse mais peu m'importait. Leur collection de livres étaient si impressionnante, si rare, si fabuleuse ! Les mots me manquaient pour dire à quel point j'étais enthousiasmé par la tonne de travail qui m'attendait.

Et pourtant, au lieu de m'y mettre, je préparai ma première farce au sein d'Esperanza. Je me demandais qui allait me maudire, qui allait m'en vouloir pour quelques jours. Le volumineux pot de peinture bleu électrique n'avait pas été difficile à trouver. Au contraire, dans mes pérégrinations pour apprendre à me diriger dans les bâtiments, j'étais tombé sur la classe de matières artistiques comme une évidence même ! J'avais pris le temps d'observer et ne voyant personne, j'étais entré et avais "emprunté" ce qui allait tant m'aider à réaliser mon oeuvre. Entre temps, j'avais fini par me perdre, autant parce que je ne savais pas où inscrire mon oeuvre que tout simplement parce que j'étais distrait par toutes les choses à voir.

Je finis à l'accueil. Mon pot en main. Il commençait à peser lourd, il était donc peut-être temps de mettre mon plan en oeuvre. Je regardai de tous les côtés, clairement, la voie était dégagée. Je finis au-dessus de la porte du lieu que j'avais choisi pour ma farce et je me mis à attendre. Il finirait forcément par avoir un clampin qui viendrait demander tel ou tel renseignement. J'avais moi-même à en prendre pour cesser de me perdre. Quoique se perdre, c'était amusant. Et le ciel était beau, la forêt verdoyante et je comptais commencer mon inventaire par les auteurs dont le nom débutait par la lettre G.

Alors que mes pensées n'avaient plus ou moins ni queue ni tête, je vis enfin arriver un groupe d'élèves. Il y en avait à la tête, assurément une sorte de leader. Il était mignon. De toute façon, j'avais tendance à tout trouver mignon alors... Avec un sourire machiavélique, j'attendis qu'il soit trop proche et se penchai brutalement le pot de peinture bleu électrique pour qu'il n'ait pas le temps d'éviter. Puis je posai le pot sur la fenêtre à côté de moi et je descendis de mon perchoir pour voir de plus près le résultat.

-Magnifique ! Absolument magnifique !

J'applaudis avec enthousiasme, très fier de ma blague. Et le bleu lui allait bien en plus, peut-être que ça lui donnerait l'idée de porter cette couleur. Je sentis une aura menaçante venir des personnes qui étaient avec lui. Eh bien quoi, c'était un peu de peinture -bon, une bonne dizaine de litres- mais pas de quoi fouetter un chat ! J'espérai que les autres élèves que je rencontrerais aurait plus d'humour en dehors de la bibliothécaire, sinon, j'allais vite s'ennuyer.  

-Le bleu te va bien, dommage, je n'ai déjà plus de peinture.

Mais ça n'était que partie remise. Tiens, le monde avait l'air de tourner plus lentement, était-ce le moment de danser une valse ?

Depuis quelques jours, Anazel n'arrivait plus à avoir un moment de libre. Dès qu'il sortait de sa chambre, il était poursuivit par ses possessions en manque d'attention. En temps normal, il en aurait été amusé, et en aurait grandement prit soin, seulement, une petite nouveauté le freinait franchement dans tout ce qu'il voulait entreprendre : ce tatouage sur son flanc. Il lui serait impossible de le cacher si il décidait de passer un moment en douce compagnie, alors depuis que Ryan le lui avait imposé, il n'avait strictement vu personne. Connaissant l'oiseau, c'était un exploit qu'il tienne le coup, mais la fierté aidait grandement et justement, ses possessions ne comprenaient pas qu'il soit soudainement aussi réfractaire.

Alors qu'il avait l'habitude de très peu se vêtir, il ne montrait plus rien de son torse, qu'aujourd'hui encore il cachait soigneusement sous un débardeur noir bien opaque, au grand dam de ses admirateurs. Les cours plus tôt l'avaient lassé, et c'était avec ses trois favoris qu'il s'était mis en quête d'un lieu où s'isoler et se reposer. Il savait que ces trois là ne l’ennuieraient pas de peur de représailles. En passant près de l'accueil, il avait décidé d'y tenter sa chance, puisqu'on aurait probablement pas l'idée de venir le chercher par ici. Il avait bien sentit une présence dans la pièce, mais ça ne l'avait pas dérangé plus que ça.

Il avait à peine eu le temps d'ouvrir la porte, et de faire un pas dans la pièce qu'il sentit quelque chose lui tomber dessus, quelque chose de passablement humide et gluant, puis des exclamations. Sous le choc, il fallut bien quelques secondes au jeune démon pour réagir, et baisser les yeux vers ses longues et belles mèches ébènes... recouvertes de bleus. Puis se fut l'animosité dont firent preuve ses compagnons qui lui vint vaguement à l'esprit avant que celui-ci ne se brouille lentement et inexorablement.

Ses cheveux... ses beaux, magnifiques, merveilleux cheveux... ! Oser lui faire ça... oser faire ça devant ses possessions... oser lui lancer quelque chose de sale et salir son image par la même occasion... ! L'aura du démon se libéra lentement, menaçante et lorsque ses yeux se relevèrent vers l'inconnu, ils s'étaient allumés d'un vert intense, avec une lueur sauvage, mais surtout, Anazel montrait les crocs en grognant. Les trois autres élèves avaient reculés, autant par réflexe que par inquiétude, mais le jeune démon les oubliait un peu pour se focaliser sur cet inconnu. Il ne savait même pas qui il était, ni pourquoi il s'en prenait à lui. Tout ce qu'il savait, c'était qu'il allait raser cette endroit.

Toujours planté devant la porte, Anazel leva son poing serré, et lorsqu'il l'ouvrit une tornade s'en échappa, gagnant vite en taille et en puissance, commençant à tout ravager sur son passage. Les livres et les feuilles qui se trouvaient dans la pièce se mirent à voler dans tous les sens, et les étagères craquèrent. Ce n'était qu'un début bien sûr, parce que celui qu'il voulait écrasé, c'était ce type qui avait osé le teindre en bleu. Le démon n'était plus très clair dans ses pensées, la colère seule avait prit le dessus, et il n'avait aucune intention de s'arrêter.

Je levai un sourcil. C'était étrange cette nouvelle tension dans l'atmosphère. Allons, cet élève n'allait quand même pas prendre la mouche pour une dizaine de litres de peinture ! Et pourtant si. Je soupirai profondément alors que les "disciples" de peinturluré reculèrent vraisemblablement de peur. Je vis alors les superbes yeux verts s'allumaient et devenir si intenses. Ils me firent penser à du poison emprisonné dans des billes. Très beau. Impressionnant. Et l'aura. Cela faisait longtemps que je n'avais pas rencontré une aura pareille. C'était si plaisant et si oppressant en même temps...

Je regrettai tout de même un peu mon manège quand le jeune garçon leva la main et laissa apparaître une tornade. Une tornade en intérieur. Non, mince, les livres ! Je perdis mon sourire, ses pauvres ouvrages n'avaient rien fait et je venais de les offrir à la colère d'un gosse très narcissique. C'était triste quand même, le ciel restait tout bleu, lui. Le pire, c'est que l'élève avait l'air d'avoir complètement perdu la boule.

-Eh bien, il t'en faut peu pour craquer ton slip.

Je n'aurais pas parlé ainsi dans la bibliothèque mais on y était pas alors... Et comme il tenait clairement à me faire payer mon acte, je n'avais plus qu'à sortir de l'accueil avant que les personnes et les livres qui y sont prennent encore pour moi. Je passai en courant près de monsieur Bleu et lui fit une grimace tout en poursuivant ma route. Après tout, si j'étais dans les ennuis, autant y être jusqu'au bout, pas vrai ? Je prenais ça avec philosophie tout en m'extasiant sur le fait que l'herbe était tellement verte que des moutons apprécieraient d'y pâturer.

-Je suis là, monsieur Bleu ! Ne crois-tu pas que tu exagères ? Tu as tout l'air d'un enfant qui n'a jamais appris à rire de lui-même. Je trouve cela très triste !

On pourrait croire que je voulais réellement en rajouter, mais non, au contraire, je voulais que le calme revienne. Surtout pour une si petite farce. Mes employeurs m'en voudront si dès le premier jour, il faut réparer des choses à cause de moi. Et je les comprendrai. Je me mis à voleter... pas que ça me ferait aller plus vite mais au moins, l'herbe toute verte garderait sa couleur. Quoique pas forcément pour longtemps. Comment fait-on pour calmer un enfant déjà.

-Ah, je sais ! Je t'achèterai des cookies ! Et du shampoing !

Ça devrait aider, non ? Hum, je ferai bien un tour au cirque après, tiens. Pour peindre les lions en vert.

Le sourire de l'inconnu qui s'effaçait alors qu'il constatait tous les livres qui volait et se déchiraient autour de lui était absolument plaisant. Anazel avait eu envie d'en voir plus, et sa tornade continuait à prendre lentement en puissance. Si cela continuait, elle n'aurait pas tardé à fracasser les murs, et déjà les meubles remuaient, et les étagèrent commençaient à tomber.

Anazel ignora totalement sa remarque, et à vrai dire, dès que le jeune démon s'énervait, il perdait tout discernement, et les mots avaient beaucoup de mal à l'atteindre. Quand il passa près de lui pour sortir de la pièce, Anazel se tourna simplement, le suivant sans se presser. Cette fuite contrecarrait simplement ses plans de détruire cette partie du bâtiment, mais ce n'était pas vraiment un problème. Il dépassa ses possessions sans même leur accorder un regard, se moquant bien de savoir si ils allaient le suivre ou s'enfuir. La seconde option était sans aucun doute préférable, car une fois calmé, Anazel s'en voudrait si il les avait blessé.

Le jeune démon traversait la pelouse sans plus se soucier de quoi que ce soit d'autre que de sa cible, gardant une allure pressée, et un surnom stupide qu'il lui sortit le fit tiquer légèrement, mais ce fut surtout quand il le traita d'enfant qu'il sentit sa fureur augmenter, et ce fut d'un grognement sonore qu'il lui répondit. L'homme s'était mis à flotter légèrement au dessous de la pelouse, le provoquant encore plus en sortant des absurdité, et le démon en eu assez.

Sans plus attendre, il étendit ses ailes qui déchirèrent son haut sans qu'il n'y pense une seule seconde et en quelques battements d'ailes il l'avait rejoint, volant à côté de lui. Il ne lui laissa pas le temps de réagir, d'un revers de la main, il frappa de toute sa force pour le déstabiliser dans sa fuite pendant qu'une tornade allait le réceptionner de l'autre côté. Le jeune démon était prit d'une forte envie de le fracasser, et le regarder se faire démembrer par l'air qui se déchaînait, pas seulement par la tornade, mais partout autour de lui.

C'était amusant d'être un pauvre lapin. Sauf que j'étais un lapin volant, poursuivant par les vents d'une tornade sur lesquels j'aimerai m'envoler. Ou pas. Difficile à dire, l'élève était mignon à être en colère mais il était aussi en train de teindre l'herbe verte en bleu... Vert et bleu... Je clignai des yeux quand l'élève se mit à voler près de moi. Oh, il était un démoniaque petit ange ! Quelle joie. Par contre, qu'il puisse être encore plus en colère, c'était un peu le pompon. Parce que non seulement, ce n'était pas du tout ce que je recherchais en faisant des blagues mais aussi parce qu'il était et réagissait comme un enfant à l'ego mal soigné.

Je pris le coup sans essayer de le contrer et je finis dans la tornade de monsieur Bleu. Ça piquait, mais je supportais cela parce qu'il était temps que je redevienne un peu plus sérieux. Même si cette colombe en train de perdre ses plumes, c'était aussi triste qu'amusant. Je me permis de répandre de la fumée de partout et la pressai contre le nez de l'élève pour la faire entrer dans ses poumons pour l’asphyxier. Il avait beau contrôler le vent, je contrôlais ma fumée à volonté. Et je ne voulais pas à lui faire de mal, juste le calmer. Ma fumée multicolore était partout, donnait de nouvelles teintes au monde. J'avais toujours l'impression d'être un hippie quand je la laissais faire.

-Je suis le nouveau bibliothécaire, jeune homme. Je voulais juste faire une petite blague mais il serait temps que vous vous calmiez. Si vous ne voulez pas avoir l'air immature et surtout, si vous ne voulez pas que quelqu'un de plus méchant et plus puissant que moi intervienne, alors il va vous falloir vous maîtrisez par vous-même.

J'avais cessé de le tutoyer, parce que je reprenais mon rôle de membre du personnel. J'avais même arrêté de sourire même si je trouvais vraiment tout cela dommage. Si les gens étaient aussi susceptibles par ici, je ne pourrais pas faire des blagues très longtemps. Je trouvais ça triste, les blagues, ça n'était pas pour humilier, c'était réellement pour aider les gens à apprendre à rire d'eux-même. Je sentit l'air marin, j'eus envie d'aller se baigner mais ce serait pour plus tard.

Surtout que la tornade commençait à me faire réellement mal. Alors je me changeai aussi en fumée pour en sortir. Je me mélangeai à toute la fumée que j'avais créé, ayant envie de s'étendre un peu partout mais la tornade le troublait et il m'était difficile de m'en dégager totalement. Je n'avais pas envie que ce manège continue tout de même, c'était fatiguant tout ça. Hum, j'avais envie de pop-corn. Et je ne voulais pas donner plus d'ordres à l'élève. Il devait se contrôler, point. Sinon...

Eh bien sinon, je me demandais qui allait intervenir. Ça allait encore être quelque chose... C'était amusant finalement une herbe verte et bleue.

-Calmez-vous.

L'homme avait été prit dans sa tornade, et Anazel s'était arrêté, volant juste au-dessus du sol pour le regarder tourner dedans. Sa tornade n'était bien sûr pas à son maximum de puissance, et elle restait surtout focalisée sur un seul endroit, puisqu'il ne voyait plus trop l'intérêt de l'éparpiller, même si ça n'empêchait par le vent de souffler fort et de façon illogique un peu partout autour. Puis soudain une fumée étrange apparue et vint se presser contre le démon, rendant le passage que l'air plus difficile. Il l'avait même sentit entrer dans ses poumons, puis l'homme reprit la parole. Donc il savait parler respectueusement quand ça l'arrangeait ? Seulement, ça ne suffirait pas à calmer le démon, c'était même parfaitement stupide comme technique.

L'homme se changea ensuite lui-même en fumée pendant qu'Anazel peinait à respirer, et essaya de s'enfuir, se permettant en plus de lui donner un ordre. Le démon changea alors simplement de tactique, plutôt qu'une tornade, ce furent quatre puissants courant qu'il lança sur lui, ramenant la fumée par la même occasion, simplement pour le coincer au centre, et lui faire sentir par la même occasion la pression de l'air. Pendant ce temps, le démon avait ramené sa main à sa bouche, forçant lui-même l'air à passer à travers la fumée de force. Bien sûr, ce fut un brin douloureux, et Anazel se pencha ensuite en avant, toussant et crachant du sang, mais l'air passait.

Toujours en colère, il avait ignoré les mèches bleues qui encadraient son visage, sans non plus prendre la peine de libérer l'homme, et il souffla simplement :

« Bibliothécaire... ? »

Le jeune démon se mis à rire doucement, froidement, avant de murmurer d'une voix légèrement essoufflée :

« Ridicule... »

Il n'avait pas d'autre façon de décrire le comportement de cet homme, sa façon de voir les choses, et ce qu'il venait de lui dire. C'était parfaitement ridicule, et il se demandait même si il n'était pas légèrement stupide sur les bords. Anazel cracha une nouvelle fois du sang avant de se redresser et relever les yeux vers lui, et poursuivre tout aussi froidement :

« Vous arrivez à peine et vous vous en prenez déjà aux élèves ? Ça vous amuse de les pousser à bout ? Ou alors vous n'avez strictement aucune conscience de ce qui peut vous arriver à vous, ou votre bibliothèque. »

Il ne semblait pas l'avoir visé en particulier, ce qui voulait dire que ça aurait pu retomber sur n'importe qui. Si ça n'avait pas été lui qui avait reçu le pot de peinture, qui sait qui aurait voulu lui faire comprendre sa colère, et de quelle façon.

« Est ce que vous avez seulement conscience d'où vous mettez les pieds, et de la stupidité dont vous faîtes preuve ? »

Anazel était loin d'être le pire, mais il n'en restait pas moins extrêmement rancunier. Il avait beau adorer les livres, si cet homme continuait à le pousser à bout, il n'hésiterai pas à détruire son lieu de travail, peu importe comment il s'y prendrait, et il n'avait pas manqué sa réaction dans l'accueil plus tôt.

Et dire que j'avais seulement voulu animer un peu le coin et on m'en voulait pour ça. Je trouvais vraiment la réaction de monsieur Bleu très exagéré par rapport à ce que j'avais fait. Un garçon comme lui ne perdrait jamais une once de popularité, il devrait le savoir. Surtout qu'il était vraiment mignon. Et le bleu, ça lui allait bien. Le rouge beaucoup moins par contre... Sauf si c'était du rouge sang... Hum, peut-être que je devrais lui offrir des habits pour me faire pardonner. Un joli string bleu... Avait-on le droit de coucher avec les élèves, il faudrait que je le demande à un collègue...

Je grimaçai sérieusement quand il se fit du mal pour retirer ma fumée de ses poumons. Par le désert, il n'avait pas du tout besoin de faire ça ! J'allais l'enlever... Je détestais le fait qu'il se soit fait mal ainsi, je ne me voyais pas du tout comme un danger alors qu'il pense que je puisse en être un. Bon, je n'étais pas spécialement tout doux, tout sucre non plus mais là quand même... Je me demandai quel goût son sang avait. Au final, l'herbe si verte ne l'était plus tellement mais elle restait belle. Et puis le sang, c'était nourrissant. Moins que la peinture... Hum, il faudra que je nettoie ce désastre.

En quoi tout cela était ridicule ? Ah, enfin monsieur Bleu comprenait que son énervement était ridicule ! Quoique...

-Je ne cherche à pousser personne à bout pas plus de m'en prendre à qui que ce soit, jeune homme, je le jure. Je veux juste m'amuser et faire connaissance avec les gens. Je suppose que mon humour ne vous fait pas rire du tout... Enfin, je suppose... Vous savez que le bleu vous va bien.

Il sentait qu'il allait bientôt reprendre forme humaine mais bloqué dans les barrières de vent, ce serait assez gênant. Et douloureux. Est-ce que la mort, c'était atroce ? Je secouai la tête, mes pensées recommençaient à partir dans tous les sens.

-Je ne me moque pas de vous. Et je ne voulais pas du tout vous faire mal.

Je changeai de plan et revins dans celui-ci sous forme humaine pour m'incliner devant l'élève, très proche de lui. J'avais envie de le laver avec un savon à la vanille. Et je me disais que je planterai bien du jasmin devant ma maison.

-Je vous prie donc de m'excuser et j'essaierai de me souvenir de votre visage pour ne plus vous faire de farce. C'est dommage que vous trouviez cela stupide... Je... Je ne suis pas doué par les relations avec les gens.

Et j'étais très gêné de l'avouer. Je ne comptais plus du tout calmer la colère de l'élève mais au moins, je me serai expliqué. S'il tentait encore de me faire mal, par contre, je me sauverai, parce qu'il fallait que je sois en forme pour pouvoir nettoyer tout le désordre. Et acheter un nouveau pot de peinture. J'étais énormément déçu que ma première farce soit aussi mal prise et je pense que ça se voyait sur mon visage mais si monsieur Bleu n'aurait aucune pitié pour moi. Pour les livres... Eh bien ça m’ennuierait beaucoup mais les directeurs m'avaient assuré que ces derniers ne pouvaient pas être réellement détruits. Mais pour mon inventaire, ça me compliquerait la tâche... Sans compter que je ne le faisais pas pour moi mais pour les élèves dont lui.

-N'avez vous pas besoin d'aller à l'infirmerie, monsieur... Euh, je suis Ambroise Poitiers.

Autant que monsieur Bleu sache sur qui il voulait tant taper, hein ?

Anazel avait vaguement écouté l'homme s'expliquer, et il n'avait vraiment que faire de sa parole. Non, son sens de l'humour ne le faisait absolument pas sourire. Si il avait trouvé une autre plaisanterie, du genre, qui n'était pas salissante, peut être, mais là ce n'était pas le cas. Quant au fait qu'il veuille s'amuser, ça oui, il l'avait bien comprit, mais qu'il le fasse à ses dépends ne lui plaisait pas du tout. De même pour le fait qu'il ne veuille pas lui faire de mal. Qu'il essaie de le blesser l'aurais beaucoup moins dérangé.

L'homme disparut de sa cage d'air pour réapparaître près de lui, Anazel tourna simplement le regard vers lui, arrêtant l'air qui tournoyait maintenant dans le vide et le regarda s'incliner sans prononcer un mot. Il s'excusa, et quand il lui dit qu'il ferait en sorte de ne pas refaire de lui la victime d'une plaisanterie de mauvais goût, Anazel pensa simplement qu'il avait fortement intérêt à ce que ça ne soit pas le cas. Par contre, quand il lui dit qu'il n'étais pas doué avec les gens... là le démon émit simplement un éclat de rire moqueur. Il se moquait totalement du fait qu'il soit gêné, et que ce soit visible. Ça ne l'étonnait pas du tout d'apprendre ça, si c'était de cette manière qu'il faisait ses rencontres.

Le visage d'Anazel s'était fait à nouveau froid et distant pendant l'instant où le bibliothécaire sembla plongé dans ses pensées. Puis il reprit la parole, et le démon haussa un sourcil. L'infirmerie ? Pour quoi faire ? Sa blessure s'était déjà guérie avant même qu'il ne pense à en parler. En plus de se moquer de lui, cet homme le sous-estimait sérieusement. Le démon avait laissé entendre un reniflement dédaigneux, puis l'avait toisé de haut en bas, avant de souffler un mot, un seul :

« Vermine. »

Ses ailes s'étaient brusquement déployées, et il avait décollé sans un regard de plus. Le démon n'avait pas envie de s'ennuyer de ce genre de présence, et n'avait plus que l'envie de prendre une douche. Et puis maintenant qu'il était de si mauvaise humeur, il se foutait un peu qu'une de ses possessions voit son tatouage, il voulait simplement se défouler et prendre un peu de sang. Du coup, Anazel préféra avant tout aller se défouler, en décollant il avait fait signe à l'une de ses possessions qui avait continué de suivre la scène de venir le rejoindre, il n'avait pas eu à attendre très longtemps pour que le jeune homme le rattrape une fois le sol rejoint. Il était d'abord allé faire trempette dans la mer pour se débarrasser de la couleur, puis avait emmené le jeune homme dans une caverne, où il avait enfin pu s'appliquer à penser à autre chose.

Le pire étant qu'Anazel passait beaucoup de temps à la bibliothèque, il risquait de revoir cet homme assez vite, ce qui était très loin de le réjouir. Il lui faudrait bien un petit moment pour oublier cette histoire.